En Corps, le film de Cédric Klapisch

Une résonnance toute particulière

En Corps affiche du film
L'affiche de "En corps" de Cédric Klapisch (2022). © STUDIOCANAL

Avez-vous vu « En Corps », le nouveau film de Cédric KLAPISCH ?  Loin des clichés des films de danse, c’est une véritable Ode à la Vie  ! Le metteur en scène nous propose ainsi de suivre la reconstruction d’une femme blessée au cœur et au corps, entre Paris et la Bretagne. 

Je vais commencer par vous introduire le film de manière générale, puis faire son synopsis, avant de vous exprimer en quoi il m’a profondément touchée.

Introduction

Ce film franco-belge est sorti le 30 mars 2022 (1). Il a été coécrit et mis en scène par Cédric KLAPISCH (2) qui n’en est pas à son premier film ! A l’heure où j’écris ces lignes, il en a 14 au compteur dont la célèbre trilogie de L’Auberge Espagnole (2002), Les Poupées Russes (2005) et Casse-Tête Chinois (2013). 

Son titre international est Rise, qui peut se traduire par : monter, se lever, se relever, surmonter, réussir… Un joli titre, en somme, aussi poétique et bien choisi que sa version française.

A noter que le tournage a eut lieu en pleine période de Covid19. C’est cette particularité qui a permis à Klapisch d’avoir accès à certains lieux (comme la scène du Théâtre du Châtelet ou encore la Grande Halle de La Villette) et à certains danseurs qui autrement auraient été en tournée…(3)

Ce film met en valeur tous les types de danse : le contemporain, le hip-hop et bien-sûr la danse classique. « Beaucoup de spectateurs ne savent pas qu’ils aiment la danse. […] J’essaye d’avoir un côté vulgarisateur d’un monde qui est mal connu d’après moi« , indique Cédric Klapisch, le réalisateur de « En corps » (4). 

Synopsis du film "En Corps"

Élise est une talentueuse danseuse de ballet, âgée de 26 ans. Après une grave chute durant une représentation de La Bayadère, on lui apprend qu’elle ne pourra peut-être plus jamais exercer son art. Après le choc terrible, elle tente de se reconstruire. Elle fait plusieurs rencontres, entre Paris et la Bretagne, notamment les membres d’une troupe de danse contemporaine, dirigée par Hofesh Shechter, célèbre chorégraphe israélien (1).

Une résonance particulière pour moi

Qu’il est étrange d’aller voir un film dont l’héroïne porte le même prénom que soi ! D’autant qu’elle est animée d’une même passion de la danse et s’en voit privée un temps par une blessure au pied… Certes, il y a de nombreuses différences entre nous et nos histoires de vie mais l’écho de la blessure du corps et de l’âme est assez fort pour me parvenir douze années après ma guérison.

Le personnage du kiné, aussi caricatural soit-il, vient enrichir le tableau en amenant cet aspect de ma vie professionnelle au devant de la scène

Vous comprenez à présent pourquoi ce film m’a touchée en profondeur. 

Barre improvisée dans la cage d'escaliers © Emmanuelle Jacobson-Roques – CQMM
En Corps, le film
Séance de kinésithérapie © Emmanuelle Jacobson-Roques – CQMM

La résistance aux changements

Ce film est arrivé à point nommé, à une période de ma vie où j’avais peur de changer de vie alors que j’avais déjà franchi le cap. J’ai donc naturellement été sensible à la capacité de Klapisch à pointer du doigt nos résistances au changement, nos peurs et nos fausses croyances. J’ai aussi apprécié sa subtilité à amener un changement de perspective à travers les prismes des différents personnages.

La complexité des liens familiaux

Le réalisateur, en nous plaçant en observateur des relations familiales du personnage principal, nous permet d’en saisir la complexité du panorama. Nous pouvons ainsi percevoir la pudeur à dire ses sentiments, les attentes non exprimées… Cette position nous offre à voir des points de vue croisés de personnages qui ne se comprennent pas complètement. Des réflexions intéressantes à ramener au sein de nos propres relations familiales !

En Corps, le film
Relation père-fille © Emmanuelle Jacobson-Roques – CQMM
En Corps, le film
Crise de couple © Emmanuelle Jacobson-Roques – CQMM

Stéréotypes contemporains

Au passage, Cédric Klapisch, toujours fin observateur de notre époque, fait exploser les stéréotypes ! Il n’oublie pas de glisser quelques allusions aux débats qui agitent la société : l’image de la femme (hilarante scène de shooting de photos de robes de mariée) ou le véganisme (un cuisinier perfectionniste joué par Pio Marmaï qui se pose des questions).

Exacerbation des sens

La mise en scène met en lumière le lien entre exacerbation des sens et reconnexion à la vie. La beauté du détail (du corps à l’assiette), les choix musicaux rythmés, les mouvements parfois si proches de la transe, les caresses d’un vent de liberté, la place de la nourriture, de la sexualité, l’humour… Rien ne semble posé au hasard pour tisser la toile d’une nouvelle vie !

En Corps, le film
Sur la scène de La Villette © Emmanuelle Jacobson-Roques – CQMM
En Corps, le film
Trahison © Emmanuelle Jacobson-Roques – CQMM

La vie et la mort

La symbolique du cycle vie-mort-vie est bien présente dans le film. L’héroïne dit elle-même qu’elle est « comme les héroïnes de ballet classique, morte, fracassée ». La chorégraphie qui la remet en piste, la fait jouer une femme morte dans les bras d’un homme qui cherche à la réanimer en la faisant danser. Le réalisateur nous rappelle que la recherche de perfection mène à la mort et qu’au contraire la fragilité est une richesse qui peut se transformer en force et nous connecter à notre force de vie.

Résilience à toute épreuve

Le thème principal traite de la résilience, cette capacité à dépasser les épreuves en contournant les obstacles tel un cours d’eau que rien n’arrête. La vie n’est pas un long fleuve tranquille ! Elle est un voyage aux paysages variés comme le rappelle la citation énoncée par le personnage de Murielle Robin « C’est parce que j’étais tombée si bas que j’ai pu monter si haut. »

En Corps, le film
Résilience © Emmanuelle Jacobson-Roques – CQMM
En Corps, le film
Sauts sur la scène de La Villette © Emmanuelle Jacobson-Roques – CQMM

Sursaut

C’est en effet quand on est au plus bas, que s’exprime le sursaut de vie, qui nous permet de rebondir, de modifier légèrement sa perspective pour enfin changer de vie. L’héroïne se souvient du conseil de sa mère : « Profites de toutes tes vies ! » Je ne sais s’il en est de même pour vous, mais j’ai déjà l’impression d’avoir vécu plusieurs vies, d’avoir laissé de nombreuses mues sur le chemin…

En attendant la prochaine transformation, suivons ce conseil et faisons de notre mieux pour être plus vivants, plus incarnés. Le film nous a offert de nombreuses pistes à explorer pour remettre de la vie en nous. A nous de jouer !

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Références

  1. https://fr.wikipedia.org/wiki/En_corps
  2. https://fr.wikipedia.org/wiki/C%C3%A9dric_Klapisch
  3. Podcast Tous Danseurs #112. Cédric Klapisch et son film En Corps rediffusion https://www.tousdanseurs.com/podcast/ep-112-cedric-klapisch/ et # 72 Cédric Klapisch, réalisateur. Film En Corps.https://www.tousdanseurs.com/podcast/ep-72-cedric-klapisch/
  4.  https://www.francetvinfo.fr/sports/danse/cinema-en-corps-une-histoire-de-danse-et-de-renaissance_5048311.html
  5. Youyube, Bande Annonce Officielle du film En Corps de Cédric Klapisch https://www.youtube.com/watch?v=WMqIkiI6fAA
  6. En Corps, le film